Les syndicats et l’emploi
par
Publication : avril 1985
Mise en ligne : 6 mars 2009
L’ EMPLOI repose sur les débouchés,
sur leur extension. Il faut vendre avec profit et toujours davantage.
Mais comment atteindre une clientèle pareillement sollicitée
sur un marché saturé que se disputent, à couteaux
tirés, des douzaines de fournisseurs ? Contre une concurrence
étrangère à bas salaires, les efforts de productivité
sont dérisoirement inefficaces et de même que les fusions,
ils créent des coupes sombres parmi les personnels astreints
à d’angoissantes migrations. En laminant les débouchés,
les hausses de prix imputables aux circuits de la distribution ont sur
l’emploi le même effet. Il n’est plus possible de multiplier les
débouchés au rythme de ce qui sort des ateliers robotisés,
sauf à recourir aux gaspillages, aux armements et aux guerres.
Autre solution pour occuper les chômeurs : un retour à
l’artisanat, à l’ère de la brouette, ou encore les travaux
d’utilité collective mais dont le financement pose problème.
Telles sont les données incontournables auxquelles se heurtent
les Syndicats pris à leur propre piège, enferrés
dans une impasse, refusant tout dialogue avec les « utopistes
». Les soupes populaires ? Une réponse au chômage,
un pis-aller que chacun s’accorde à trouver préférable
à une révolution économique, pourtant inéluctable,
mais constamment différée à seule fin de préserver
les menus et précaires privilèges d’une minorité
vivant du profit et des manipulations monétaires, du commerce
du crédit, de l’exploitation du travail et du besoin.
Cette crise de débouchés qui rejaillit au niveau de l’emploi
est née de l’inadéquation de l’outil monétaire
aux situations de pléthore devenues permanentes. Dissociant les
revenus du niveau des prix et de la durée de l’emploi, un système
à monnaie de consommation élargit la consommation aux
limites de la production tout en allégeant le travail de chacun
sans perte de revenus. Il est grand temps pour les centres de réflexion,
conseillers des gouvernements, de prendre en considération ces
vues dont le caractère « utopique » tient seulement
à l’obstruction orchestrée par les camarillas conservatrices
à l’égard des idées non conformistes, non cataloguées.
En exergue, ces extraits d’une anthologie tirée des ouvrages
de J. Duboin :
« Quand il n’est plus nécessaire de payer un travailleur
pour qu’il produise, l’Etat doit le payer pour qu’il consomme. »
« Il serait plus facile de faire consommer le surplus de la production
par les chômeurs que de faire absorber les chômeurs par
une production qui n’a plus besoin d’eux. »
« Curieuse monnaie que celle qui empêche à la fois
de consommer et de produire ! » De l’hébreu pour tous ceux-là
qui persistent à marcher sur la tête.