Appel du Mouvement International de la Réconciliation

Sortons de l’hexagone
Mise en ligne : 31 août 2007

Le Mouvement International de la Réconciliation (MIR) a pour objectif fondamental de contribuer à la mise en œuvre d’une résolution non-violente des conflits interpersonnels, intercommunautaires et internationaux. Cette non-violence active s’inspire de l’Evangile et s’enrichit de la pensée et de l’expérience de grands acteurs de paix tels que Gandhi et Martin Luther King, qui était lui-même membre du MIR.

À l’occasion de la Journée mondiale de l’environnement, le 6 juin, aux côtés d’un collectif d’associations européennes et africaines, le MIR a lancé une campagne destinée à attirer l’attention des citoyens et des responsables politiques sur les graves atteintes à l’équilibre écologique, à la santé des personnes et aux droits humains qui se poursuivent dans toute l’Afrique.

Cette année, elle a axé sa campagne sur les dangers que font courir en République Démocratique du Congo (RDC) et notamment au Katanga, les pratiques inconsidérées et dangereuses de certaines usines d’exploitation des minerais.

 Un peu d’histoire

Lors de la Conférence de Berlin en 1885, les puissances européennes se partagent l’Afrique. D’abord propriété personnelle du Roi des Belges, Léopold II, l’État du Congo devient en 1908 une colonie de la Belgique. Ses richesses minières considérables sont exploitées au seul bénéfice du colonisateur qui lui interdit toute ouverture vers le monde extérieur. Les contestations, la plupart du temps ponctuelles et locales, sont brutalement réprimées. Ce n’est qu’en 1955, après la visite au Congo du Roi Baudouin 1er, que naît l’idée de créer une communauté belgo-congolaise, amorce d’un plan de décolonisation. À partir de 1958, confrontée à une contestation politique grandissante, la Belgique décide de précipiter l’indépendance dont la date est fixée au 30 juin 1960, après des élections législatives qui se tiendront en mai pour la Constitution du Parlement congolais. Les chambres belges adoptent la Loi fondamentale qui régira désormais le nouvel État. Au cours de la cérémonie de proclamation de l’indépendance, le Premier ministre Patrice Lumumba, dans un discours non prévu, critique vivement la gestion coloniale belge. Ce qui indispose et le Roi et les Belges mais impressionne favorablement les Congolais et l‘opinion internationale. Patrice Lumumba devient un héros national. Mais l’armée se mutine quatre jours après la proclamation de l’indépendance. Les Belges fuient le Congo. Il n’y a plus d’encadrement administratif dans le pays. Les troupes belges interviennent. Le 11 juillet 1960, Moïse Tshombé proclame la sécession de la province du Katanga, riche en minerais, de cuivre et de cobalt notamment.

Lumumba fait appel à l’ONU pour l’envoi de casques bleus. Le 8 août, la partie du Kasai, riche en mines de diamant, déclare à son tour son indépendance. P. Lumumba demande de l’aide à l’URSS. La guerre civile s’étend à tout le Congo. L’Union minière du Haut Katanga, société belge, soutient la sécession qui bénéficie du renfort de mercenaires européens, les tristement célèbres “Katangais”. On a donc en présence des troupes belges, l’armée congolaise, des forces de l’ONU et des mercenaires. Le président de la République démocratique du Congo, Joseph Kasavubu et son Premier ministre P. Lumumba se révoquent réciproquement le 5 septembre. Le 14, le chef de l’armée Joseph-Désiré Mobutu les suspend tous les deux. Lumumba est emprisonné puis livré à M. Tshombé qui le fait assassiner le jour même (17 janvier 1961). Fin 1962, les forces de l’ONU parviennent à mettre fin à la sécession du Katanga. Entre 1963 et 1965 des “rébellions populaires” armées contrôlent presque les deux tiers du territoire. Nommé Premier ministre en 1963, M. Tshombé est renversé en 1965 par J-D. Mobutu, qui fera régner sur le pays un régime despotique qui ne prendra fin qu’en 1997, où une rébellion partie de l’Est du Congo amène au pouvoir L-D. Kabila, ex-chef d’un maquis installé dans les montagnes du Kivu. Il sera assassiné à son tour en janvier 2001.

C’est son fils Joseph qui est actuellement chef de l’État. Mais sous L-D Kabila, comme sous J-D Mobutu, le pays n’a cessé d’être le terrain de soulèvements, de combats, de guerres dans lesquels les armées des pays voisins Rwanda, Ouganda, Angola, Zimbabwe, Namibie ont joué des rôles importants. Plus de quarante ans après la décolonisation, ce pays immensément riche a été complètement ruiné par sa classe politique dont l’unique ambition était la quête des honneurs, du pouvoir et de l’argent.

 Le règne des prédateurs

La situation anarchique du pays a évidemment été une aubaine pour les firmes privées étrangères qui ne demandaient que ça pour s’emparer des énormes richesses minières du Congo. ONU, ONG internationales, tout le monde sait que « l’heure est au partage des dépouilles » [1]. Parmi celles-ci, la plus juteuse est certainement la Gécamines, ancien groupe minier public du temps de Mobutu, qui possède 30% des réserves mondiales de cobalt, 10% de celles de cuivre et du zinc à profusion. En récompense des services militaires rendus dans la guerre contre le Rwanda, L-D. Kabila en avait offert les plus beaux morceaux au Zimbabwe, puis « poussé par la Banque mondiale, il a laissé mourir la Gécamines exsangue et confié à des partenaires souvent étrangers des dizaines de mines du groupe public »1. Depuis, c’est le Far West : avec la complicité des autorités, des entrepreneurs du monde entier se ruent sur le Congo et se servent. Un rapport rédigé en 2005 à la suite d’une enquête rigoureuse du Parlement congolais décrit en détail le pillage organisé des richesses minières. Dans la partie consacrée au Katanga, il dénonce, en donnant de nombreux exemples, « les entreprises nébuleuses à l’actionnariat obscur, les exonérations douanières et parafiscales accordées de façon exagérée pour des périodes allant de quinze à trente ans (… ) sans tenir compte de l’importance réelle de l’investissement… ».

Inutile de dire qu’elles ne se préoccupent que de leurs intérêts financiers et qu’elles se moquent totalement des règles sanitaires et environnementales.

 La campagne du MIR

Les médias et cette campagne

• Articles dans :
Le Monde, Razzia sur le trésor du Katanga, Jean-Pierre Tuquoi, (11 juin 2006) ;
La Décroissance (n°41, juillet - août 2007) ;
Alternatives économiques, (n°260, juillet - août 2007) ;
Réforme (31 mai - 6 juin 2007) ;

• Émissions radio :
- radio Africa n°1, dans « les matins d’Eugénie », à l’occasion de la Journée mondiale de l’environnement ;
- Aligre FM dans l’émission Résonances africaines(5 juin 2007).

Pour plus de détails :
mirfr (arobase) club-internet.fr

Son objectif est de veiller à ce que les intérêts financiers des usines de traitement de minerais en République Démocratique du Congo n’aient pas de conséquences dévastatrices sur la santé des personnes, l’environnement et l’économie du pays [2].

En RDC, en effet, de nombreuses usines de traitement des minerais ne respectent pas les législations sanitaires et environnementales et usent de pratiques qui mettent en danger leurs ouvriers et les personnes vivant dans les zones proches des industries.

Un cas typique est celui de Lubumbashi, capitale de la province du Katanga. Une société appelée SOMIKA a implanté dans une zone de la ville où toute construction industrielle est interdite, une usine dont les déversements d’acide empoisonnent une nappe phréatique qui dessert plus d’un million d’habitants. Elle met ainsi gravement en péril l’environnement et la santé des personnes qui y vivent. C’est d’abord pour eux que le MIR se mobilise car, malgré de nombreuses décisions de justice lui intimant l’ordre de délocaliser son activité, la SOMIKA refuse de déplacer son usine.

Dans un premier temps, le but est d’agir auprès de plusieurs instances internationales telles que l’Organisation mondiale de la santé, l’Organisation internationale du travail, le Programme des nations unies pour le développement, … pour qu’il soit procédé à un audit impartial à Lubumbashi. Dans un second temps, le MIR souhaite obtenir la délocalisation effective et sans délai de cette usine, afin de créer un précédent qui puisse ensuite s’appliquer dans d’autres zones de la RDC.

Les enjeux de cette campagne sont :

Sanitaires : l’écoulement des métaux lourds de l’usine SOMIKA dans l’eau consommée par les habitants de la ville de Lubumbashi risque d’engendrer de graves problèmes de santé pour ceux-ci (saturnisme, cancers, etc ). Or, plus d’un million de personnes consomment quotidiennement cette eau, ce qui donne une idée du nombre de victimes potentielles.

Environnementaux : l’écoulement des mêmes métaux dans les nappes aquifères et les sols risque d’avoir des conséquences très lourdes au plan écologique, à court et à long terme.

Sociaux : en termes de droits humains et de droit du travail, comme l’indiquent de nombreux témoignages, les employés de la SOMIKA travaillent dans des conditions dangereuses et inhumaines. Comme le disent les habitants de Lubumbashi : « après 8 mois de travail à la SOMIKA, on est un homme fini ».

De gouvernance : des questions peuvent légitimement se poser quant à la capacité des autorités à faire respecter leurs décisions quand on sait qu’à de nombreuses reprises, elles ont donné l’ordre à la SOMIKA de déplacer son usine mais que celle-ci ne l’a jamais fait, sans pour autant en subir la moindre conséquence. Cette incapacité dissimule-t-elle un manque de volonté politique ? Qui sont les actionnaires de la SOMIKA, qui à ce jour n’ont pu être identifiés ? Quelles sortes d’intérêts financiers et politiques sont en jeu pour que des membres des ONG locales soient menacés de mort ?


[1JP Tuquoi, Le Monde, 1/06/06

[2Même si, à notre avis, c’est un vœu pieux tant qu’on est dans le système capitaliste !


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