Rappels d’histoire
Publication : octobre 1999
Mise en ligne : 3 décembre 2005
Êtes-vous concerné ?
Les services qu’il s’agit de mondialiser portent sur des milliers de milliards de dollars chaque année. Ils englobent quasiment toutes les activités humaines. Voici seulement ceux qui sont déjà visés (mais d’autres doivent être ajoutés) : Schedule of Specific Commitments,
European Communities and their Member States
GATT/SC/31 et suivants, du 15 avril 1994.
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La création des deux institutions financières internationales, la Banque Mondiale (BM) et le Fonds Monétaire International (FMI) s’est faite tout de suite à la fin de la seconde guerre mondiale, en 1944, à Bretton Woods aux états-Unis. Leur rôle était, en principe, d’assurer la stabilité des monnaies et d’aider les pays en développement [1].
Mais aucun accord ne fût alors trouvé pour créer une organisation internationale du commerce. Tenant à une telle création, les Américains invitèrent, trois ans plus tard, à La Havane (Cuba), 33 pays choisis, et ceux-ci conclurent un accord douanier et commercial, le GATT (General Agreement on Tariffs and Trade). De 1947 à 1985 cet accord donna lieu à 7 réunions de négociations. Mais au cours de la 8ème, qui commença en 1986 à Ponta del este en Uruguay, un tel désaccord apparut sur le commerce agricole entre les états-Unis et l’Europe, qu’après trois années de discussion, les négociations durent être suspendues en décembre 1990. Le conflit dura encore trois ans, jusqu’à ce qu’un accord intervienne entre Sir Leon Brittan, qui négociait pour l’Europe, et Mickey Kantor, qui parlait pour les états-Unis. L’Acte final du “8ème round” fut enfin signé à Marrakech le 15 avril 1994 : il instituait l’OMC, qui est donc indépendante des Nations-Unies, et il ne s’agit donc pas d’un parlement mondial dont les membres seraient élus par leurs pays respectifs et qui n’agiraient que dûment mandatés.
Dès l’année suivante, il y a donc quatre ans, cette OMC fut le cadre de négociations pour un Accord Multilatéral sur l’Investissement, mais celles-ci se heurtèrent au refus des délégations du Tiers monde, qui y virent l’institution définitive de leur recolonisation sous l’autorité des gros investisseurs et des entreprises transnationales, organisant le commerce mondial à leur seul profit et au mépris de toute législation. Il s’agit en effet d’un changement de civilisation tel que le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes ferait place au droit des investisseurs à disposer des peuples...
Comment le marché mondial pouvait-il, malgré une telle opposition, obtenir le résultat qu’il voulait ? En déplaçant la discussion du cadre de l’OMC vers celui de l’OCDE ! Cette Organisation pour la coopération et le développement économique ne comprenant que les 29 pays les plus industrialisés de la planète, lesquels possèdent 477 des 500 plus riches entreprises mondiales, elle avait tout intérêt à édicter des règles internationales qui favorisent ces entreprises... L’ennui est que cet organisme d’étude et de prospective n’a jamais reçu mandat de négocier un traité international. Alors les pourparlers furent organisés dans le plus grand secret à Paris... au château de la Muette, le bien nommé. Heureusement, le pot aux roses fut dévoilé et l’opinion, ou une partie consciente de l’opinion, s’émut de ces projets et des méthodes avec lesquelles les marchés voulaient placer leur dictature au-dessus des lois et au mépris des peuples. L’alerte fut donnée, et nos lecteurs se souviennent de nos efforts, dès notre N° 975 de mars 1998, pour les convaincre de manifester leur désaccord. Il y eut un tel mouvement de protestation de la part de simples citoyens, plus souvent, d’ailleurs, que de la part de leurs élus, et dans un très grand nombre de pays, qu’il eut un résultat : la France se retira des négociations et ce retrait entraîna l’arrêt des pourparlers... dans le cadre de l’OCDE.
Mais la dictature des marchés est voulue par de puissants lobbies, et ceux-ci ont obtenu de remettre “ça” dans le cadre du 9ème round de l’OMC, qui s’ouvre dans l’état de Washington le 30 novembre.
Les lobbies ont bien fourbi leurs armes
C’est encore Sir Leon Brittan, alors même qu’il a été démissionné de la Commission de Bruxelles, qui a soigneusement monté le coup. Non seulement un ordre du jour “gargantuesque” a déjà été préparé (la liste ci-contre est seulement celle des services) et même été entériné (bien qu’il soit question aussi d’un accord sur les marchés publics, et aussi d’obtenir la suppression de certains contrôles ou inspections qui “gênent” le commerce de certains produits, et ...?), mais le coriace ancien commissaire veut que la négociation porte simultanément sur la multitude des sujets, afin que la discussion ne puisse pas être bloquée par d’éventuels désaccords : on ira ainsi plus vite, surtout si un représentant est amené à manquer certains débats pour participer à d’autres.
Mais la riposte n’est pas prête
Les gouvernements européens se veulent rassurants et déterminés à défendre leurs citoyens... mais ils n’ont mis que quelques dizaines de fonctionnaires pour suivre tous ces dossiers alors qu’aux états-Unis, plusieurs centaines d’experts des milieux d’affaire y travaillent depuis longtemps.
Allons, L. Jospin, nous rassure en affirmant que l’OMC est plus démocratique que l’OCDE ... mais il a aussi déclaré que le pouvoir politique ne peut pas agir contre les marchés. à nous de conclure !
[1] Les suffrages des pays membres y sont proportionnels aux montants de leurs contributions. La prépondérance des décisions revint donc aux pays les plus riches. Alors quand des prêts sont “consentis”aux pays qui ont besoin d’aides, ils sont assujettis de plans d’ajustement structurelle (PAS), qui les obligent à réduire leurs dépenses publiques, à privatiser et s’ouvrir au marché, ce qui paralyse le développement de leur économie propre !