La résolution du 25e congrès

ERREMENTS AU P.C.F. :
par  H. MULLER
Publication : mai 1985
Mise en ligne : 9 mars 2009

L’imagination n’était guère au rendez-vous de ce 25e Congrès où l’on a psalmodié la litanie habituelle des « il faut » et des « n’y a qu’à  », prêché pour un rassemblement autour d’un «  socialisme à la française », sorte d’ectoplasme, trompe-la-faim pour la grande foule des victimes de l’argent, celles de l’économie de profit, de l’économie libérale et marchande.
Rassembler ? C’est le voeu commun à tous les partis politiques. Encore faut-il annoncer un programme, un projet de société. Or, ni le programme réformiste du P.C. ni son projet de société autogestionnaire et de participation emprunté à ses pires adversaires, trotskystes du P.S.U. et gaullistes du R.P.R., ne semblent mobilisateurs pour un électorat si longtemps dupé. Quant à l’économie mixte à laquelle la Révolution fait aussi référence, le professeur Jean Baby en avait fait, il y a des années, le procès sans appel : socialisation des pertes, individualisation des profits. Leçon oubliée.
Un rassemblement contre la crise ? N’est-ce pas rejoindre le discours des partis de droite pareillement désireux d’y mettre fin, c’est-à-dire de rétablir la fermeté des prix menacée par les crues de production, par l’insuffisance des débouchés, de libérer les profits, de restaurer le plein emploi, la prospérité des banques, celle des entreprises et des marchands, bref de juguler la maudite abondance cause de tout le mal ?
Enfermé dans ses dogmes, le P.C. doit affronter mille et une contradictions que sa dialectique s’efforce d’éluder. A placer l’emploi en première ligne sans référence à sa finalité, à sa nécessité, la Résolution accorde un blanc-seing au gaspillage. Nous sommes entrés dans l’ère de la robotique, de la biotechnique. Il n’est pas besoin de plus d’emplois pour créer plus de richesses. La production marche bien, trop bien même. C’est non pas l’accroissement des richesses qui pose problème, leur incroyable profusion en témoigne, mais leur écoulement, leur distribution dans l’équité.
Droit au travail ? Mais aussi droit au loisir, aux activités libres, loisir aujourd’hui permis par la diminution considérable du travail encore nécessaire pour assurer les approvisionnements utiles. Il faut seulement dissocier les revenus de la durée de l’emploi et, pour cela, souscrire à une révolution économique et monétaire (1) à laquelle le P.C. reste hostile, a priori.
Egalité des chances ? Une illusion. Une expression vide de sens, passe-partout.
La chance tient aussi, le P.C. l’oublie, au milieu d’éducation, aux relations familiales, à l’état de fortune, aux alliances, aux talents particuliers, au caractère, à l’hérédité, au sexe, à la couleur de la peau, à la prospérité de l’employeur, à la nature de l’emploi et à bien d’autres paramètres.
Réforme fiscale, allègement des charges des entreprises, appel à l’initiative, aux responsabilités ? Ici, le PC ratisse très large, espérant amadouer les P.M.E. en empruntant leur vocabulaire, leurs slogans. Pourtant le petit patronat ne ménage guère son personnel. Apre au gain, volontiers frondeur, ennemi des syndicats, il cultive l’anti-communisme à l’image de tous les bien-pensants.
Renforcement du rôle des syndicats, collectifs autogestionnaires, élections, conseils d’élus ? Voilà qui n’arrange guère l’ouverture en direction de ces mêmes P.M.E. Il en va de même de la participation des travailleurs à la gestion. Ce vieux serpent de mer a la vie dure. A chacun son métier. Il appartient aux directions et aux cadres des entreprises d’assumer leurs décisions selon leur compétence. L’excès de palabres nuit au rendement et le système de la participation crée d’injustes inégalités chez les salariés de même qualification. Quant à l’actionnariat ouvrier, ses dupes se multiplient avec les dépôts de bilan.
Le P.C. n’oublie pas les paysans, promettant de soutenir les cours, dans la foulée de tous les gouvernements précédents confrontés au « maudit problème », celui des excédents. Il laisse toutefois le revenu de l’agriculteur tributaire de sa seule récolte, c’est-àdire du hasard des conditions météorologiques, de la chance ou de la malchance qui vient ruiner son effort, le fruit de son travail.
Amélioration du pouvoir d’achat ? C’est l’Arlésienne, jamais au rendez-vous pour des millions de ménages aux prises avec leur propre quotidien tellement différent de sa mise en carte par les indices officiels. La citadelle des prix, celle des marges du commerce n’apparaît-elle pas inattaquable ? Qui s’y intéresse ? De toute évidence, ni les partis ni les syndicats, plus soucieux des droits des travailleurs que de ceux des consommateurs.
Créer de nouveaux débouchés ? Tous les Etats l’ont fait en mobilisant l’argent de leurs contribuables et vogue la galère ! Il importe seulement que le pouvoir soit en bonnes mains, au service des affairistes, des producteurs et des marchands que l’Etat débarrasse de leurs encombrants surplus, auxquels il procure marchés et profits. Il en va tout particulièrement ainsi pour les armements et les guerres, sources intarissables de, débouchés, de profits et d’emplois, balancier économique, soupape aux excédents industriels et miniers, pactole pour les banques, remède radical au chômage et, pour cette seule raison, acceptés par le parti qui n’y trouvent pas malice, envisage seulement leur « réduction progressive ».
Il est douteux que « le poids et l’action des pays socialistes aient contribué à instaurer une coexistence pacifique  ». Deux camps ont dû s’affronter dans une lutte à mort et le monde s’est vu précipité dans une course aux armements dont consommateurs et contribuables font les frais. Le socialisme a besoin d’une paix que le capitalisme refuse de lui accorder.
Les réalisations soviétiques ne sont pas niables. Elles surclassent parfois en maints domaines et par leur gigantisme, celles des pays capitalistes. Associés aux profits d’Etat, ces succès, fruit d’une relative rareté, finiront par décliner aux premières manifestations d’abondance que devra combattre, à son tour, le capitalisme d’Etat.
« Un socialisme à la française » ? Un socialisme à monnaie de consommation recueillerait, à cet égard, tous les suffrages (1). Malheureusement, les thèses de BELLAMY, objet d’un tabou, n’ont jamais rencontré d’écho au sein de l’appareil du parti. Pourtant « l’enjeu de civilisation en cette fin du XXe siècle » est bien l’accommodement des structures économiques à l’abondance déferlante et à l’éloquente diminution du travail exigible, nécessaire

aux approvisionnements.
On ne se libérera pas de « domination du capital exploiteur  » sans révolution monétaire. Faire du travail un but pour la vie, c’est nier les virtualités d’accomplissement de l’être humain dans l’espace de liberté que lui offre l’accroissement de son loisir. En alléger au maximum le fardeau, tel devrait être le rôle dévolu au progrès, un progrès purgé de ses exigences financières.

La règle démocratique attribue à la majorité le monopole de la vérité, du jugement, alors que la raison est plus souvent l’apanage de minorités pourvues de maturité, de réflexions, mais privées des moyens de se faire entendre.
C’est au niveau des centres de décision, à celui des médias que doivent s’exercer la propagande idéologique et l’action des groupes de pression.
Au gouvernement, le P.C. s’est surtout heurté à une nuée de « taupes » préparant les conditions d’un retour au pouvoir d’une Droite libérale pressée d’en ressaisir les rênes, de restaurer les privilèges chers à ses mandants, ceux de l’argent.

(1) « Projet de Société pour Demain » - 1977 publié 1982).


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