Au fil des jours

Chronique
par  J.-P. MON
Mise en ligne : 28 avril 2010

 Quelques chiffres

Aux États-Unis, le taux d’inemploi réel (prenant compte des “travailleurs découragés”, qui ont cessé de rechercher un emploi) atteint 18,5 % et le taux de chômage de longue durée touche 6,5 millions de personnes. La crise a supprimé 7,3 millions de postes.

En France, fin 2009, le chômage touchait 10 % de la population active (et 24 % chez les jeunes) et ces chiffres étaient en augmentation au premier trimestre 2010.

Selon l’économiste et historien Nicolas Baverez1 (qui fournit les données précédentes) cette “déstabilisation” du marché du travail est appelée à durer parce que « la reprise reste fragile, notamment en Europe où elle est en passe d’avorter » et que « la croissance plafonnera pour une décennie dans le monde développé autour de 1 % en raison du désendettement. Le retour aux créations d’emplois sera lent compte tenu de l’intensité des gains de productivité et du mouvement de restructuration des entreprises ». Baverez, qui est pourtant loin d’être un gauchiste invétéré, en déduit que « l’installation d’un chômage de masse et la raréfaction des emplois vont créer une nouvelle question sociale dans les pays riches ». Comme le sauvetage des banques et l’enrayement de la désinflation se sont traduits par une augmentation de la dette publique des pays développés représentant aujourd’hui 31 % de leur PIB et 110 % en 2014, il va falloir procéder à une réorientation totale des politiques publiques mais les solutions classiques (priorité à la croissance et à l’emploi et, même, audace suprême, changement de la régulation du capitalisme) que préconise Baverez ne sont plus adaptées à la gravité de la situation.

Plus que jamais l’instauration pour tous d’un revenu garanti de niveau suffisant pour vivre décemment est d’actualité. Mais cela ne peut se faire qu’en socialisant le système bancaire.

 Les nouveaux émigrés

Selon une étude du site eFinancialCareers.fr, 58 % des banquiers et professionnels de la finance seraient prêts à partir à l’étranger si la taxe exceptionnelle prélevée sur les bonus de 2009 devenait récurrente. Bel exemple de patriotisme donné aux “nouveaux Français”, après le débat sur l’identité nationale !

 Les joies de la concurrence

Depuis presque trois ans, le marché français de l’électricité a été ouvert à la concurrence.

Sans grand succès car, de fait, EDF continue à conserver un quasi monopole de la fourniture d’électricité. Pour la Commission Européenne, c’est insupportable, elle a donc pressé la justice et le gouvernement français de mettre fin à cette “injustice”. Ayant échappé à une lourde amende de Bruxelles qui aurait pu atteindre 10 % de son chiffre d’affaire (66,3 milliards d’euros en 2009), EDF s’est engagée à ouvrir chaque année à la concurrence 65 % en moyenne des volumes d’électricité qu’elle produit. Et en outre, pour que ses concurrents en France (GDF-Suez, Poweo, Direct Énergie, etc.) puissent vendre du courant à un prix compétitif, une loi prévoit qu’EDF leur cède à bon prix environ 30 % de sa production d’électricité nucléaire … Il va devenir difficile pour certains de faire de la publicité pour “l’électricité verte” !!

En attendant, les concurrents d’EDF s‘impatientent. Le cas de Poweo, passé en 2009 sous le contrôle du groupe autrichien Verbund, est particulièrement révélateur : après avoir subi cette même année une perte de 93,5 millions d’euros, son patron vient de déclarer que la société ne pouvait pas couvrir ses coûts sur le marché de détail et que s’il n‘y avait pas de réforme, Poweo abandonnerait tout simplement ses 400.000 clients français et les rendrait à EDF.

Ah, que c’est dur de vouloir être un apôtre de la concurrence !

 Le dieu entreprise

C’est sous ce titre que le journaliste Philippe Arnaud fait l’analyse [1] du livre Pouvoir, finance et connaissance, un essai d’Olivier Weinstein, profeseur émérite à l’Université Paris XIII, qui écrit : « Jamais sans doute l’entreprise n’aura été autant placée au centre de la société ; jamais le système de l’entreprise et “l’esprit d’entreprise” qu’il recouvre, le culte de l’entrepreneur ou celui de l’efficacité managériale n’ont été autant présentés comme modèle social qu’ils ne le sont aujourd’hui ». L’entreprise est « l’acteur central du progrès économique ». Elle est une « institution sociale majeure ». Mais, selon Weinstein, « la financiarisation de l’économie a contribué à établir un nouveau pouvoir managérial et financier, bénéficiant dans les faits d’une autonomie d’action sans précédent ». On assiste ainsi depuis quelques années au déplacement du pouvoir de l’État vers l’entreprise et à la domination souveraine de celle-ci. Pour Weinstein, il faut repenser le rôle du management et considérer que « les grands groupes ne doivent pas être au service des actionnaires mais devenir des institutions au service de la société ». Il faut aussi nous poser la question de « la rationalité et du caractère durablement soutenable de cette économie de la connaissance à domination marchande dans laquelle nous sommes désormais entrés ».

 Un répit pour les fonds spéculatifs

Au sein de l’Union Européenne, une régulation “sévère” des fonds spéculatifs (hedge funds) est en débat. Le principal point de discorde est d’accorder ou non à des gestionnaires domiciliés hors de l’Union de proposer leurs produits en Europe.

La négociation s’annonce difficile parce que le Royaume-Uni, qui abrite la majorité des hedge funds opérant en Europe, a une position beaucoup plus souple que la France et l’Allemagne. Les Britanniques proposent un système de “passeport intérieur” qui permettrait à un fonds, autorisé dans un pays membre (le Royaume-Uni par exemple), de solliciter les investisseures du reste de l’Europe …

L’Union Européenne vient d’accorder un répit aux gestionnaires de fonds … pour cause d’échéances électorales : la négociation a été reportée après les élections législatives britanniques de mai prochain.


[1Le Monde Économie, 09/03/2010.


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