Au fil des jours


par  J.-P. MON
Mise en ligne : 9 mars 2007

 Les “climato-sceptiques”

Ce sont ceux qui, comme l’inénarrable Claude Allègre, n’admettent pas encore que l’homme est le principal responsable du changement climatique en cours. Ils s’interrogent : « Et si, après tout, ce réchauffement n’était qu’une invention de quelques climatologues en mal de budgets ? Et si, quand bien même le réchauffement était réel, l’homme n’y avait qu’une part minime ? Et si, quand bien même la responsabilité de l’homme venait à être démontrée, ce changement climatique était au pire une évolution sans grande importance, au mieux une bénédiction pour l’humanité ? » [1]. La conclusion de la synthèse présentée début février à Paris par le Groupe intergouvernemental d’experts sur l’évolution du climat (GIEC) est pourtant sans ambiguïté : « la terre se réchauffe et le principal responsable de ce changement est l’homme ».

Selon la National Oceanic and Atmospheric Administration, les températures mondiales enregistrées en janvier dernier ont été les plus élevées jamais constatées à cette période de l’année [2]. Elles étaient supérieures de 0,85°C à la moyenne du XX° siècle ; elles ont dépassé le record établi en 2002 (+0,71°C). Les température sur les terres émergées ont été supérieures de 1,89°C à la température moyenne. À cause de ces températures élevées, le continent eurasiatique a connu les deuxièmes plus faibles chutes de neige de son histoire.

Cela ne suffit pas à convaincre les climato-sceptiques. Poussés par l’administration américaine, ils exercent des pressions pour que le groupe III du GIEC introduise, dans le rapport qu’il doit rendre le 4 mai à Bangkok, la nécessité de mettre en œuvre la “géo-ingénierie globale”, c’est à dire des technologies ayant tout simplement (!!!) pour but de refroidir globalement la planète. Il ne s’agit pour le moment que de propositions théoriques allant de l’injection dans la stratosphère de plusieurs centaines de milliers de tonnes de soufre pour faire partiellement écran au rayonnement solaire (ce qui permettrait de faire baisser la température moyenne de la Terre de 0,5°C… pendant environ 2 ans) à “l’ensemencement” des océans avec des nutriments ferreux afin d’accroître la productivité planctonique et accentuer ainsi le piégeage du CO2 atmosphérique, ou encore à l’envoi d’une constellation de sondes-parasols entre le Soleil et la Terre pour réfléchir une partie du rayonnement solaire… Le danger est que les climato-sceptiques se transforment ou soient remplacés par des “géo-ingénieristes” convaincus que l’homme peut influer comme bon lui semble sur le climat, ce qui conforterait la Maison Blanche dans son souhait de ne pas toucher au mode de vie américain en affirmant : il ne faut rien changer par ce que nous avons la certitude scientifique que l’homme aura bientôt le pouvoir de réparer les dommages qu’il a causés au climat et à l’environnement. Ce n’est heureusement pas l’avis de la grande majorité des spécialistes du climat. Mais la bataille n’est pas gagnée d’avance quand on sait les moyens qu’utilisent l’administration Bush pour “convaincre” un certain nombre de scientifiques de contester systématiquement les résultats du GIEC ou de l’Union of Concerned Scientists [3]. Et que les compagnies pétrolières essaient de semer le doute dans les médias et le public américain : EXXON a dépensé au moins 19 millions de dollars pour cela depuis 1997. Sans oublier le groupe de réflexion néo-conservateur American Enterprise Institute qui a tenté de convaincre des scientifiques de réfuter les conclusions de l’ONU sur le réchauffement en leur offrant jusqu’à 10.000 dollars par article [4].

 Échapper au fisc

C’est le grand combat que mènent les entreprises des deux côtés de l’Atlantique. Lors du dernier sommet de Davos, des syndicalistes ont présenté aux journalistes un document d’une soixantaine de pages particulièrement édifiant : « En vingt ans, le taux d’imposition sur les sociétés a baissé d’un tiers dans les pays de l’OCDE, passant d’environ 45% en 1985 à 28,6% en 2005 » [5]. Le dispositif le plus efficace permettant aux entreprises d’échapper presque totalement au fisc est la zone franche. Dans les zones franches destinées aux exportations les taxes sont pratiquement nulles. Ce document révèlait qu’il y en avait 850 en 1998 et qu’il y en a plus 5.000 en 2004. Mais ces défiscalisations officielles ne suffisent pas aux transnationales : elles sont passées maîtres dans l’art d’utiliser les paradis fiscaux. Les syndicalistes en ont compté 73 dont la moitié ont moins de 25 ans d’existence. L’exemple de Boeing est particulièrement révélateur : il a créé 31 filiales « dans des paradis parfois trop petits pour qu’un avion de ligne puisse y atterrir ! » La banque Morgan Stanley a aujourd’hui 99 filiales dans des paradis fiscaux alors qu’elle n’en avait que deux en 1997.

L’imposition sur les sociétés compte ainsi de moins en moins dans les économies nationales (entre 5 et 10 % de l’ensemble des taxes perçues dans un pays et souvent moins de 5 % du produit intérieur brut).

Les syndicats ont dénoncé ce système qui accroît la pression sur les salariés et les PME qui n’ont pas les outils nécessaires pour ces tours de passe-passe fiscaux. Mais ils ont été relégués dans la salle réservée aux conférences de presse et leurs communiqués soigneusement placés à l’écart. Ils n’ont pu débattre avec les chefs d’entreprises et les ministres que par journalistes interposés.


[1“La prochaine bataille du climat”, par Stéphane Foucart, Le Monde, 21/02/2007.

[2Communiqué NOAA du 16/02/2007.

[3Nom traduit par Association des scientifiques inquiets.

[4Le Monde, 15/02/2007.

[5Le Monde, 27/01/2007.


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